Pour les entreprises industrielles et commerciales, fiabilité et compétitivité sont les principaux critères de sélection d’un port. Ces qualités ont fait défaut à nos principaux ports depuis de trop nombreuses années, aussi les chargeurs accueillent-ils très favorablement le projet de loi de modernisation des ports autonomes après son passage par le Sénat.
Ils en approuvent totalement les principaux fondements notamment :
- la nouvelle gouvernance des ports qui, en orientant clairement les fonctions commerciales vers les acteurs du privé, recentre le rôle de l’autorité portuaire sur ses fonctions régaliennes.
- Les chargeurs appuient tout spécialement le principe posé par le projet de loi de l’interdiction faite aux ports, sauf dans des cas très limités, d’être propriétaire des outillages de manutention, et d’en faire l’exploitation.
Conséquence de cette nouvelle répartition des rôles, le transfert des outillages et par conséquent du personnel les opérant – grutiers et portiqueurs - vers les sociétés de manutention est une nécessité absolue pour réaliser un commandement unique qui donnera un pouvoir hiérarchique réel et définitif de l’employeur de manutention sur les personnels grutiers et dockers. Cette organisation donnera enfin à nos ports les moyens d’être à armes égales avec leurs principaux concurrents. Pour les chargeurs, il s’agit de la mesure la plus importante de la réforme. Compte tenu de la résistance de certains syndicats à ce levier de modernisation, les chargeurs se félicitent que la loi prévoit une organisation par défaut pour éviter une démarche dilatoire et un risque d’enlisement
Outre le recentrage sur les missions d’autorité publique, de régulation, d’aménagement, et de développement de la desserte terrestre des ports, il manquait dans la rédaction d’origine l’affirmation que l’autorité portuaire devait avoir un rôle de contrôle de l’application des règles de concurrence. C’est chose faite grâce à un amendement du Sénateur Revet qui a fait droit à cette demande .
Cet ajout a été voulu par l’AUTF pour prémunir les clients des ports – chargeurs et armateurs- contre les conséquences préjudiciables pouvant résulter de situations de monopoles de fait ; situations fréquentes dans nos ports, qui pour beaucoup n’ont pas pu développer une activité suffisante pour justifier le développement d’une pluralité d’acteurs dans le domaine des services aux navires : le remorquage, ou le pilotage. Il en est de même pour des activités de manutention spécifiques : certains vrac secs, par exemple sont déjà dans les mains d’un seul opérateur en raison de l’étroitesse du marché. Il est donc primordial que l’autorité portuaire puisse protéger les clients captifs de tout abus de position dominante.
L’organisation des ports basée sur un Conseil de surveillance et un Directoire n’appelle de la part des chargeurs que peu de commentaires. Cette organisation nous apparait bien adaptée à un management plus dynamique que celui résultant des actuels conseils d’administration. Tout juste nous semble-t-il nécessaire de souligner la « qualité » que devrait posséder les « personnalités qualifiées » qui en feront partie.
Pour les chargeurs, ces personnalités doivent être en mesure d’apporter une certaine hauteur de vue au Conseil de Surveillance et permettre une ouverture sur ce qui existe à l’étranger et qui fonctionne bien (benchmark). Cette qualité devrait au moins être appliquée aux « représentants du monde économique » qui devraient selon nous avoir une représentativité au moins nationale. A contrario, ces personnalités ne devraient pas appartenir au milieu des acteurs portuaires locaux afin d’éviter les conflits d’intérêts, voir même le danger de prise d’intérêts.
Bien au contraire, leConseil de Développement est le lieu ad hoc au sein duquel les professionnels locaux trouvent leur place. Outre les représentants de la place portuaire envisagés pour y siéger, il ne nous semble pas choquant qu’en proportion égale des fournisseurs de services portuaires, les usagers des ports – c'est-à-dire les clients, chargeurs ou armateurs - soient également spécifiquement représentés, et non simplement envisagés de façon aléatoire dans le groupe des personnalités qualifiées.
Leur présence est même incontournable puisqu’il est prévu que le conseil de développement soit consulté sur la politique tarifaire. Lorsque certains services aux navires sont effectués dans un contexte de monopole de fait ou de droit, qui d’autre en effet que les usagers, qui paient ces services au final, peuvent porter à la connaissance de l’autorité portuaire l’existence de situations abusives.
Nonobstant ces quelques points plutôt de détail, les chargeurs soutiennent totalement le projet de loi sur la réforme des ports. Ils appellent les organisations syndicales qui s’y opposent à faire preuve d’un esprit de responsabilité et à mettre l’intérêt du pays au- dessus d’intérêts corporatistes appartenant à une autre époque. Les chargeurs appellent également à un arrêt des actions qui perturbent gravement depuis près de deux mois le fonctionnement des ports français , entravant de ce fait leurs activités exportatrices , et mettant en danger la survie de nombreux emplois dans le secteur des services logistiques et portuaires Ces actions ,qui flétrissent une fois de plus la réputation des ports français auprès des décideurs logistiques du monde entier n’empêcheront pas une réforme nécessaire pour l’économie nationale, elles ne feront que ralentir la reconquête des trafics ayant désertés nos ports en raison de leur non fiabilité et retarderont d’autant l’obtention des effets bénéfiques cette réforme .