Optimiser les
performances globales d’un incontournable
transport routier
La part modale du transport routier de
marchandises n’a cessé d’augmenter ces dernières années. Cette prédominance s’explique par la capacité du mode routier à
répondre à la structure des échanges terrestres de marchandises majoritairement diffus, fractionnés
et réalisés sur courtes distances.
Tous les experts s’accordent à penser
que la route restera le mode très dominant d’acheminement des marchandises et
que cette trajectoire ne sera pas infléchie, malgré les objectifs, d’ailleurs
souvent irréalistes, qui sont fixés périodiquement aux modes massifiés. Le changement de mentalité s’est heureusement
accompli pour faire de la route, non plus un « concurrent » à
pénaliser, mais un vecteur complémentaire, voire partenaire, des modes
massifiés à travers les notions de co-modalité et d’inter-modalité.
Malgré des décennies de progrès, le transport routier de
marchandises recèle des gisements de productivité dont certains, facilement
accessibles, contribueraient à améliorer sa performance globale, économique
mais aussi environnementale.
- Une
augmentation de la charge moyenne unitaire des ensembles routiers, soit
par saturation accrue de leur capacité d’emport, soit par accroissement de
celle-ci, réduit le nombre d’ensembles à faire circuler par unité d’œuvre,
et donc à la fois le coût de la prestation et son impact environnemental,
dont on sait qu’il est un des reproches majeurs fait à ce mode (bruit, pollution locale, congestion,
contribution au changement climatique).
Si une plus grande saturation des
moyens unitaires peut être obtenue par des actions endogènes au système telles
que des progrès dans l’organisation des opérateurs (taux de remplissage,
mutualisation, réduction des kilomètres à vide…) avec l’assistance d’outils informatiques,
la mise en œuvre du levier des poids et dimensions autorisés des camions
dépend de la réglementation publique.
A cet égard, la logique qui a conduit
à inscrire dans un avenir proche la généralisation de la circulation avec un poids
maximum autorisé de 44 tonnes pour les marchandises pondéreuses doit être
étendue - les mêmes causes produisant les mêmes effets – au trafic de produits
volumineux, en autorisant, en mode expérimental pour commencer, la circulation
des ensembles routiers de grande longueur permettant de se passer d’un ensemble
routier sur trois sur les trafics concernés.
Un plan de mise en œuvre d’expériences
pilotes pour tester en France sur quelques axes l’impact de la circulation de
tels ensembles avait été stoppé net il y a deux ans sans raison autre que
médiatique.
Aussi l’AUTF réclame-t-elle la reprise des essais des ensembles modulaires
de type EMS (European Modular System) dans leur version longueur « 25m25 »
dont nombre de nos voisins européens autorisent déjà la circulation en mode
expérimental et/ou encadré.
- Le deuxième axe de progrès se situe au niveau d’une
nécessaire clarification des cadres réglementaires dans lesquels devront
se situer les acteurs du transport routier.
Seules de la clarté sur les choix
exercés dans ces domaines et une promesse de continuité dans leur mise en œuvre
permettent à ces acteurs d’inscrire leurs efforts d’adaptation dans la
cohérence et la durée. La réglementation européenne sur les émissions de
polluants des véhicules industriels (appelée Normes Euro 1 à 6) est un bon
exemple pour illustrer cette nécessaire visibilité puisqu’elle a permis des
déploiements industriels économiquement viables.
Or, beaucoup de sujets sont en attente
de positions claires des décideurs publics : traitement réservé aux
énergies et carburants nouveaux, logistique et circulation urbaines qui
nécessitent, en dépit d’enjeux locaux, un minimum de cohérence nationale, degré
final de l’harmonisation européenne de la fiscalité énergétique et des
conditions sociales du travail des conducteurs et leur transposition en droit
national…
L’AUTF
exhorte donc les pouvoirs publics à transcrire, après une nécessaire
concertation, toutes les orientations européennes et françaises portant sur les
leviers fiscaux, financiers, et normatifs qui seront progressivement déployées
pour permettre au transport routier de conserver sa contribution et sa place
dans l’économie et la société françaises.
- Enfin la productivité du mode routier dépend
fortement de la qualité des infrastructures
Alors que les infrastructures
routières françaises participent de l’attractivité du pays et que près de 10
milliards € sont injectés chaque année dans leur entretien, de sérieuses inquiétudes
pèsent à l’avenir sur la capacité qu’aura le réseau d’apporter le même niveau
de service, faute pour ses gestionnaires, notamment départementaux et communaux,
de disposer des moyens financiers nécessaires.
Faut-il craindre que des portions de
réseau ne soient plus entretenues – avec les risques d’insécurité routière aggravée
que cela entraîne - parce que la politique de mutualisation de la
maintenance s’effacerait devant une gestion par laquelle chaque tronçon de
route devrait supporter son coût de maintien en état par les seules
recettes versées par les utilisateurs ?
Le fait que l’absence
ou l’insuffisance d’entretien préventif se traduisent à terme par des
traitements curatifs coûteux justifie d’autant plus d’engager sans tarder
toutes les actions qui permettront d’éviter que l’histoire du ferroviaire et du
fluvial ne se répète dans le routier.
Au
titre de cette démarche préventive et participative l’AUTF recommande trois
mesures :
-
l’affectation
aux charges d’entretien des réseaux d’une partie des recettes issues
aujourd’hui de la taxe à l’essieu et demain de la future taxe kilométrique sur
les poids lourds.
-
la mise en
concession de toute extension ou développement du réseau national
-
la création
d’outils de diagnostic sur les prévisions d’entretien et les conséquences sur
la qualité de service d’impasses faites dans ce domaine, afin que les
gestionnaires de réseau, dans la concertation avec leurs usagers, puissent
procéder aux arbitrages qui risquent de s’avérer inéluctables.
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